Nous rendons hommage de tout cœur à un immense artiste dont les mains, fluides et légères comme le vent, ont enchanté les cordes de sa guitare avec sa merveilleuse poésie flamenca.
Francisco Sanchez Gomez, que nous connaissons sous le nom de Paco de Lucía, est né le 21 décembre 1947 en Andalousie à Algéciras, dans la province de Cadix, en Espagne dans une famille fort modeste.
C’est son père, Antonio Sanchez Pecino, lui-même guitariste, qui commencera son éducation musicale dès l’âge de 5 ans et qui le fera travailler son instrument douze heures par jour, ainsi qu’il l’avait fait pour tous ses enfants. Ses deux grands frères, Ramon de Algeciras également guitariste (Algerciras 5.01.1938/Madrid 20.01.2009) et José, chanteur de flamenco (connu sous le nom de Pepe de Lucia / né à Algeciras en 1945) contribueront aussi à l’apprentissage musical de leur petit frère. Plus tard, c’est en l’honneur de leur mère, Luzia Gomez, d’origine portugaise, qu’ils choisiront “De Lucía” comme nom de scène. Tous trois commenceront très tôt leur carrière musicale, pour aider leurs parents en des temps difficiles.
Paco expliquera plus tard, qu’au début, il ne prenait pas forcément beaucoup de plaisir à jouer, que cela représentait, pour lui, surtout du travail et que le vrai plaisir lui viendra, plus tard, avec le temps et l’expérience. Néanmoins, c’est dès son plus jeune âge que l’on reconnaîtra ses grandes capacités. Dès l’âge de 11 ans, il donne sa première représentation publique sur la Radio Algeciras. Et, à l’âge de 12 ans, il remporte le prix spécial du Concours International de Flamenco de Jerez. A 14 ans, il réalise son premier enregistrement avec son frère Pepe “Los Chiquitos de Algeciras”.
En 1963, alors âgé de 15 ans, il est engagé comme guitariste par la compagnie de danse de José Greco avec laquelle il partira pour sa première tournée aux Etats-Unis. Sur place, à New York, il fait la connaissance des guitaristes espagnols Mario Escudero et Sabicas, qui deviendront ses mentors, puis ses amis proches. Ils l’encourageront à mener une carrière solo et à écrire ses propres œuvres.
En 1964, il fait la connaissance du guitariste madrilène Rodrigo Modrego, avec lequel il enregistrera son premier album “Dos Guitarras Flamencas”, puis deux autres albums suivront : “12 canciones de Garcia Lorca para Guitarra” et “12 exitos para 2 guitarras flamencas”. Sur ces premiers albums, son style est encore très proche du flamenco traditionnel, c’est sur les albums qui suivront que son style personnel et sa vision plus moderniste du flamenco vont apparaître. En 1966, il enregistre “Impetu” composée par Mario Escudero dans son premier album solo “La Fabulosa Guitarra de Paco de Lucia”.
L’année 1975, est déterminante pour Paco de Lucia où il devient le tout premier joueur de flamenco de l’histoire à jouer au Teatro Real de Madrid. Il joue un premier set avec son frère Ramon, uniquement en acoustique, devant un public plutôt jeune, totalement subjugué. Ce fut un véritable instant de grâce et de magie pure, immortalisé sur un enregistrement, et dès lors, son talent est unanimement reconnu et l’on comprend que ce musicien est bien plus qu’un simple guitariste, qu’il porte en lui des secrets de musique et des horizons sonores encore inexplorés.
A l’époque où Paco de Lucía a débuté, même en Espagne, le flamenco n’était pas une musique très en vogue. Comme il l’a lui-même expliqué, le flamenco “était sur le point de finir dans le musée de l’histoire musicale”. Sa touche, à la fois si impétueuse et si profonde, cet élan si harmonieux qui émane de son jeu et submerge d’émotions, va conquérir les publics de tous les continents. Il réalise rapidement de nombreuses tournées dans le monde et petit à petit, sa musique va se nourrir de ses découvertes musicales et ses multiples rencontres avec des musiciens de jazz et d’autres genres musicaux, tels que Miles Davis, Thelonius Monk, Larry Corryell, Chick Corea, Pandit Ravi Shankar… Ces nouveaux accents et les innovations qu’il introduit dans sa musique donneront un nouveau souffle au flamenco qui redeviendra un genre vivant dont on retrouve désormais l’expression, source d’inspiration, dans bien d’autres registres.
Nous vous proposons, plus que des mots, d’écouter un petit florilège de sa musique, avec, en fin de sélection, sa fameuse interprétation du Concierto d’Aranjuez, l’œuvre majeure de Joaquim Rodrigo, qui est, sans conteste, la plus belle et la plus sensible des interprétations qui ont été faites de cette œuvre.
De sa vie entièrement dédiée à la création musicale, nous restons avec une œuvre magistrale, d’une grande finesse et d’une ingénieuse maestria, tant dans sa constance et sa fidélité à sa musique d’origine que dans ce qu’il a pu lui insuffler de sa haute technicité, son inspiration et sa personnalité.
Au cours de ses dernières années, il poursuivait son travail de création ponctué par de nombreux concerts, festivals, tournées tout autour du monde. Il avait établi sa résidence à Palma de Majorque, en Espagne.
Le mercredi 26 février 2014 lorsqu'il fut prématurément fauché à l’âge de 66 ans par une crise cardiaque alors qu’il était en vacances à Cancun au Mexique. Touché justement à ce cœur qu’il avait, durant toute sa vie, généreusement offert à la musique et à son public. Il semble qu’il était sur une plage et jouait avec des enfants lorsqu’il a soudainement été pris d’un malaise. Il est décédé dans l’ambulance qui le transportait à l’hôpital.
Incomparable artiste apprécié dans le monde entier, Paco de Lucia nous a lègué un immense héritage d’une musique que nous ne nous lasserons pas d’écouter pour en explorer les infinies merveilles.
Autres informations, sources, interviews - Paco de Lucia
Discographie et Biographie de Paco de Lucia – Wikipédia
++ Vie de Paco de Lucia – Wikipédia (Fr)
++ Biography Paco de Lucia (Eng)
Interview de Paco de Lucia – Le Figaro:
++ Paco de Lucia – Une légende à Paris – 15.11.2012
Crédits photos
Photo couleur: Paco de Lucia – Septembre 2007 – Festival PLAI de Timisoara
Wikimedia Commons
Photo (N&B): Paco de Lucia en 1972
Wikimedia Commons
Photo (N&B): Paco de Lucia avec John Mc Laughlin et Al Di Meloa
Wikimedias Commons – F. Antolin Hernandez