Nous vous invitons à traverser le temps pour nous intéresser à un violoniste du XIX° siècle au destin exceptionnel qui, parti de sa ville natale, Matanzas (Cuba), traversa le grand océan pour venir subjuguer ses homologues du conservatoire de Paris et conquérir le cœur des européens.

Très célèbre et glorifié de son vivant en raison de ses exceptionnels talents de musicien, en particulier au violon, son souvenir s’est peu à peu estompé, bien que sa musique soit toujours écoutée et reprise. Nous lui rendons aujourd’hui un hommage des plus mérités, afin qu’il reprenne place dans les mémoires parmi ceux qui sont considérés comme les plus grands.


José White - José Silvestre de los Dolores White Laffite

Violoniste, compositeur, multi-instrumentiste (maîtrise de 16 instruments) et professeur de violon.
(Matanzas, Cuba, 17 janvier 1836 – Paris, France, 15 mars 1918)

 

José Silvestre de los Dolores White Laffite voit le jour le 17 janvier 1836 dans la ville de Matanzas à Cuba. Son père, Carlos White était un commerçant espagnol et sa mère d’ascendance Afro-Cubaine. Dès son plus jeune âge, son père, lui-même violoniste amateur, lui donne ses premiers enseignements en musique. José montre très rapidement d’étonnantes facultés. Dès l’âge de 4 ans, il joue parfaitement du violon. Dès l’âge de 8 ans il étudie de manière systématique tout ce qui concerne l’art musical et à 15 ans, il compose sa première œuvre pour orchestre, tout en continuant d’étudier. Il suit notamment des leçons de piano au cours de son adolescence avec José Miguel Roman et Pedro Lecerff. Ses étonnantes possibilités lui permettent d’exceller au violon, au piano, il jouait également de la flûte, de la viole, de la contrebasse, du cornet, de la trompette, de la guitare et il est attesté qu’il savait jouer d’au moins 16 instruments de musique.

Alors qu’il est âgé de seulement 18 ans, il donne sa première représentation publique, le 21 mars 1854, à Matanzas. Il y exécute une fantaisie sur des thèmes d’Osborne, de Bériot, le “Guillaume Tell” de Rossini, le "Carmenaval de Venise", ainsi qu'un thème de sa propre composition “Melodia sobre aires cubanos”. Pour cette représentation, il était accompagné par le célèbre pianiste et compositeur Louis Moreau Gottschalk (1829-1869). Et c’est justement Louis Moreau qui encouragera le jeune musicien à partir poursuivre ses études musicales à Paris et qui l’aidera à récolter des fonds pour qu’il puisse effectuer le voyage.

Jose White Lafitte violoniste premier prix de violon du conservatoire de ParisJosé White arrive pour la première fois à Paris en 1855 et se présente à l’audition d’entrée au conservatoire de Paris en même temps que soixante autres candidats. Non seulement il y sera admis, mais il recevra la recommandation unanime du jury de l’audition. Pendant ses études au conservatoire de Paris, il étudie le violon avec Jean-Delphin Alard, l’harmonie et la composition avec le compositeur Henri Reber (1807-1880), le contrepoint et la fugue avec Ferdinand Taite. Et, bien sur, il enrichit ses connaissances grâce à la richesse culturelle considérable qui s’offre à un jeune étudiant dans le Paris des années 1850 particulièrement florissant de représentations musicales et fort propice aux rencontres artistiques avec ce que l’Europe compte de virtuoses et de musiciens influents.

José White étudiera au Conservatoire National Supérieur de Musique de Paris pendant 4 ans dont il sera ensuite professeur et membre de la Société des Concerts. Ses facultés étaient telles, que dès la fin de sa première année, le 29 juillet 1856, il remporte la récompense la plus élevée de l’école de musique, le très convoité “Premier Grand Prix de violon du Conservatoire de Paris”. Si bien, que le journal “la Gazette Musicale” écrivit dans ses colonnes que sa prestation a été si extraordinaire que l’on aurait dû créer une distinction spécialement pour lui, qu’il avait joué non pas comme un élève mais comme un grand artiste émérite dirigeant son orchestre, si bien, que le jury lui-même en avait été électrifié et l’avait unanimement proclamé vainqueur à peine eut-il fini de jouer.

Brillant élève, il noue de véritables liens d’amitié avec ses professeurs du conservatoire, en particulier Jean-Delphin Alard (premier violon du roi, puis nommé par Napoléon III premier soliste de la Chapelle Impériale) et également avec d’autres grands musiciens de son époque qui auront à cœur de l’aider dans sa carrière professionnelle, tels que Giovacchino Rossini, Charles-Louis Ambroise Thomas, Charles Gounod, Pablo de Sarasate, Félicien David, Camille Saint-Saëns et de nombreux autres. En 1860, son père tombe gravement malade et il retourne à Cuba où il séjourne plusieurs mois pour rester à son chevet. Il y donnera également plusieurs concerts dans plusieurs grandes villes de l’île, avant de rentrer à Paris pour continuer ses études au conservatoire.

En 1861, il donne plusieurs représentations, au conservatoire, à la salle Herz, lors du concert du pianiste égyptien A. Mansour à la Salle Pleyel en avril, et avec C. Estienne et Casimir Ney, qui lui vaudront l’enthousiasme du public et l’attention de la presse parisienne et contribueront à lancer sa carrière artistique. Cette même année, il compose Six Grandes Etudes pour Violon Op. 13 qui furent approuvées et intégrées dans l’enseignement par le Conservatoire de Paris. A l’issue de ses études, José White se lance dans sa carrière professionnelle. Lorsque Jean-Delphin Alard tombera malade, en 1964 et 1865, il le remplacera temporairement comme professeur au conservatoire, et en 1871, il deviendra membre de la Société des Concerts du conservatoire.

A cette même époque, il crée un ensemble de musique de chambre, baptisé “Société des trois anciens et modernes” avec Paul de la Nux et Jules Lasserre, puis la “Société des Musiques de Chambre”. La première reçu un accueil mitigé car elle présentait trop d’œuvres germaniques au goût des critiques. La seconde, qui présentait beaucoup plus d’œuvres de compositeurs français et de José White lui-même eut, en revanche, un très vif succès.

Dès lors, il voyage beaucoup car il est réclamé et invité à se produire dans de nombreuses cours et palais de l’aristocratie européenne. Sa renommée grandissante et ses talents d’interprétation sont tels, qu’il recevra l’honneur d’être invité à jouer de son Stradivarius (le fameux “Swansong” 1737) au Palais des Tuileries devant l’empereur Napoléon III et l’impératrice Eugénie et également au Palais royal de Madrid, en 1863, devant la reine Isabelle II, qui décidera de le décorer de la Grande Croix de Carlos III et lui fera présent d’une garniture de bouton en diamants d’une inestimable valeur. En 1874, José White effectue son dernier voyage à Cuba et se produira en 1875 au Théâtre Esteban de Guanabacoa, à la Havane, et à Santiago de Cuba. De Cuba, il part au Mexique, où son compatriote José Marti aura l’occasion de l’écouter. Marti en conservera un impérissable souvenir, un immense respect mêlé d’admiration, il aura pour lui ces mots éternels “White ne joue pas de la musique, il la sublime” et d’ajouter “L’art n’a aucune complexité que cet artiste colossal ne puisse surmonter ; il n’est aucun germe de merveilles dissimulées qu’il ne puisse déterrer et développer”. Puis, entre 1875 et 1876, il réalise une tournée aux Amériques avec son ami et compatriote Ignacio Cervantès, pianiste et compositeur de grande renommée. José White est invité pour deux représentations en tant que soliste, pour jouer avec Orchestre Philarmonique de New York et il donnera également des concerts à Boston, Washington DC et Philadelphie. Les critiques seront, là encore unanimes, et l’un d’entre eux dira même de lui, qu’il était le plus grand violoniste ayant visité ce pays. Il poursuit ensuite sa tournée qui le mènera, également, au Panama, au Venezuela, au Pérou, au Chili, en Argentine, en Uruguay, au Brésil, au Portugal, en Angleterre, en Belgique, en Italie, ..

En 1877, il s’installe au Brésil, où il est nommé directeur du Conservatoire Impérial de Rio de Janeiro et compositeur de la cour de l’empereur Pedro II de Braganza. Il y occupera ces fonctions jusqu’en 1889, date de la chute de l’Empire Carioca. Il donne alors sa démission et rentre définitivement en France, à Paris, où il redevient professeur au Conservatoire National de Paris, tout en donnant des cours privés à plusieurs disciples dans sa maison parisienne où il aura, entre autres élèves, Jacques Thibaud et Georges Enescu, qui deviendront à leur tour de très fameux musiciens. Il poursuit également son travail de composition et rédige de nombreux articles pour diverses revues musicales.

Outre cette vie de voyages, d’honneurs et de nombreuses représentations publiques où l’on pouvait apprécier l’inestimable valeur de son jeu au violon, José White, a continué à composer de nombreuses œuvres. Ecrit dès 1864, son “Concerto en Fa dièse mineur pour Violon et Orchestre” l’une de ses composition les plus connues et qu’il aimait beaucoup jouer, a connu un curieux destin : la partition de ce concerto a été perdue pendant plus d’un siècle, puis elle fut rendue à la connaissance du public par Ruggiero Ricci en 1974, lorsqu’il l’interpréta à l’Avery Fisher Hall du Lincoln Center à New York. Il en existe un autre enregistrement réalisé, en 1975, par Columbia, interprétée par Aaron Rosand et l'Orchestre Symphonique de Londres, sous la direction de Paul Freeman.

José White a, également, composé de nombreuses pièces pour violon et piano, violon et orchestre, pour clavecin et orchestre, des fantaisies, des messes et œuvres de musique religieuse, des danses telles que “Juvendud”, “Hélas” (valse lente), Boléro pour violon et orchestre, la très célèbre et toujours très appréciée habanera “Bella Cubana” qui traverse merveilleusement le temps au fil des nouvelles adaptations. Bien qu’il ne soit pas retourné à Cuba, il est resté très attaché à sa patrie d’origine, œuvrant comme il le pouvait, au vu de la distance, en faveur de son indépendance et par des compositions dédiées où l’on sent vibrer son attachement et son tempérament purement cubains. Dans ses dernières années, il dédie à son île lointaine, l’une de ses dernières œuvres “La Marcha Cubana”, écrite en 1909.

José White s’est éteint à l’âge de 82 ans, à Paris, le 15 mars 1918. Il est de ces personnes qui, fort célèbres et appréciés de leur vivant (au point qu’on le surnomme parfois le “Paganini de Cuba”), sont oubliés pendant de longues périodes avant que des passionnés ne les fassent revenir de l’ombre où ils ne devraient pas rester. Le phénomène est cependant relatif, car Cuba ne l’a pas oublié. Sa musique y est souvent jouée, en particulier “La Bella Cubana” reprise par de nombreux artistes tant classiques que modernes (et encore tout récemment dans la bande originale du film d’animation “Chico et Rita” par Bebo Valdès). Egalement, de nombreuses écoles, des conservatoires et institutions diverses, portent son nom sur l’île. Il existe également un “Prix José White” qui récompense l’interprétation au violon, et son “Concerto en Fa dièse mineur pour violon et orchestre” a inspiré un ballet intitulé “Tributo a Jose White” en sa mémoire.


Autres infos et vidéos José White:

>> Concerto pour violon et Orchestre en Fa dièse Mineur - José White Lafitte    
>> La Bella Cubana de José White par la Orchesta Cheo Belen Puig   
>> La Bella Cubana de Jose White Lafitte - Enregistrement 1924    
>> La Bella Cubana de José White par Compay Segundo   
>> La Bella Cubana de Jose White par Bebo Valdés - BO du film Chico et Rita   

Portraits images de José White (Domaine public):
Portrait 1 - José White avec son violon le jour de l'obtention du premier prix de violon du Conservatoire de Paris en juillet 1856.
Portrait 2 - Médaillon José White Lafitte
Portrait 3 - José White en 1857

Autres infos:
Biographie José White (Eng): José White - Wikipedia
Biographie José White (Esp): José White - Ecuraid  

 

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